Julia Goddard/AIBA
Jérusalem à l’époque du Premier Temple : une puissance administrative inégalée
L’article suivant est un résumé d’une présentation de Christopher Eames lors de la deuxième conférence internationale du Roger and Susan Hertog Center for the Archaeological Study of Jerusalem and Judah (Centre Roger et Susan Hertog pour l’étude archéologique de Jérusalem et de Juda). Intitulée « Épigraphie en Judée », cette conférence a réuni certains des plus grands épigraphistes du monde. L’article académique complet sur lequel se base cette présentation sera publié ultérieurement dans le Jerusalem Journal of Archaeology ( Journal d’archéologie de Jérusalem).
Le débat autour de la puissance de Jérusalem, en tant que capitale d’une monarchie israélite unie, puis du royaume méridional de Juda, fait rage depuis que l’archéologie est pratiquée, et plus particulièrement depuis plusieurs décennies. Le récit biblique de la Jérusalem de la période du Premier Temple (environ 1000-586 avant Jésus Christ) n'épargne aucun détail et ne présente aucune excuse : Jérusalem, en particulier sous les règnes de David et de Salomon (10e siècle avant Jésus Christ), était la ville dominante de la région, dotée d’une administration puissante et d’un contrôle sans entrave sur un vaste territoire.
Il est cependant devenu assez chic dans le monde de l’archéologie de considérer la ville de la période du Premier Temple comme relativement insignifiante—surtout à l’époque de David et de Salomon. Selon les professeurs Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman, Jérusalem est passée d’une « modeste ville de montagne d’environ 4 à 5 hectares » pendant la première moitié de la période du Premier Temple (âge du fer iia) à « une zone ne dépassant pas 60 hectares » à la fin de la période du Premier Temple (âge du fer iib)—« à peine plus qu’un petit marché du Moyen-Orient » (The Bible Unearthed : Archaeology’s New Vision of Ancient Israel and the Origin of Its Sacred Texts, pages 243 et 3 ; La Bible révélée : la nouvelle vision de l’archéologie de l’ancien Israël et l’origine de ses textes sacrés).
Selon les critiques, la ville (et le territoire judéen au sens large) ne faisait pas le poids face au puissant royaume du nord d’Israël et de sa propre capitale, Samarie. Selon Finkelstein et Silberman, Samarie—contrairement à Jérusalem—était une capitale « impressionnante », « opulente », et « stupéfiante » qui « évoquait la richesse, la puissance et le prestige » ; c’était la « manifestation architecturale la plus grandiose du règne d’Omri et d’Achab »—un « vaste complexe royal », construit avec une « innovation audacieuse » à une échelle si « énorme » qu’il « ne peut être comparé, en termes d’audace et d’extravagance [...] qu’à l’œuvre qu’Hérode le Grand réalisa près d’un millénaire plus tard ».
La taille physique et la grandeur de Jérusalem—en particulier au cours du 10e siècle avant Jésus Christ—sont devenues un sujet de discussion particulièrement brûlant au cours des 20 dernières années, notamment grâce aux découvertes remarquables de feue la Dre Eilat Mazar dans la Cité de David et sur l’Ophel (découvertes faites depuis la publication du livre controversé de Finkelstein et Silberman). Mais la taille n’est pas la seule mesure de l’importance d’une ville. Prenez les capitales modernes, comme Washington, D.C., aux États-Unis, Canberra, en Australie, ou Wellington, en Nouvelle-Zélande. Ces villes se situent au bas de l’échelle en termes de taille et de population.
Une mesure bien plus importante pour une capitale est sa puissance administrative. Celle-ci est notamment révélée par ses supports administratifs : les inscriptions.
Aucune autre ville de l'âge du fer II/de la période du Premier Temple en Judée, en Israël ou dans les pays voisins du Levant ne se rapproche du nombre d'inscriptions découvertes, administratives ou autres, que l'on trouve à Jérusalem.
Au fil des ans, divers corpus d’inscriptions de différentes périodes et régions géographiques ont été compilés. Jusqu’ici, il n’existe pas encore de corpus unique illustrant collectivement toutes les inscriptions de la période du Premier Temple et de l’âge du fer II trouvées à Jérusalem. Cet effort, basé sur une analyse exhaustive des corpus existants, des rapports de fouilles et des articles publiés individuellement, vise à combler ce vide.
Ce corpus (à venir) ne comprendra que des articles de provenance connue qui ont été officiellement publiés et trouvés dans les limites géographiques de la Cité de David, de l’Ophel, du mont du Temple, de la vieille ville et des vallées adjacentes (c’est-à-dire Hinnom et Cédron).
Les résultats mettent en évidence une ville levantine inégalée en termes de puissance administrative attesté par l’archéologie sur toute la période du Premier Temple, y compris la première phase de la fonction de capitale de la ville, au cours du 10e siècle avant Jésus Christ.
Vous trouverez ci-dessous un bref résumé préliminaire des résultats sous forme vulgarisée, classés par type d’inscription.
Inscriptions monumentales
Parmi les sites judéens de l’âge du fer, les inscriptions monumentales en hébreu n’ont été trouvées qu’à Jérusalem. Le seul exemple complet est l’inscription de Siloé : Cette inscription de 132 par 24 centimètres, découverte à l’intérieur du tunnel d’Ézéchias comme texte commémoratif de son achèvement, contient six registres de texte composés de 57 mots et 200 lettres, et date de la fin du huitième siècle avant Jésus Christ. Il s’agit de l’inscription monumentale la plus connue. Découverte en 1880, alors que la ville était sous contrôle ottoman, elle est actuellement conservée au musée d’archéologie d’Istanbul, en Turquie.
Il existe cependant trois autres fragments d’inscriptions monumentales qui ont été découverts à Jérusalem depuis lors. L’un d’eux a été découvert lors des fouilles de la Cité de David menées par Yigal Shiloh entre 1979 et 1985 (12 par 8 centimètres, 4 registres, 8 mots, 23 lettres, environ 700 avant Jésus Christ) ; un autre lors des travaux de restauration de l’Ophel menés par Meir Ben-Dov en 1982 (27 par 24 centimètres, 4 registres, 6 mots, 24 lettres, début du septième siècle avant Jésus Christ) ; et un autre lors des fouilles de la Cité de David par Ronny Reich et Eli Shukron de 1995 à 2010 (14 par 10 centimètres, 2 registres, 3 mots, 6 lettres, huitième siècle avant Jésus Christ).
Ces quatre inscriptions hébraïques monumentales ont un total combiné de 16 registres de texte, contenant 75 mots composés de 253 lettres. (À titre de comparaison, à Samarie, on a trouvé un seul fragment d’une inscription monumentale portant un seul registre de texte avec un seul mot de trois lettres—רשא, signifiant qui, que ou lequel—a été trouvé.)
Inscriptions funéraires
Dans ce que l’on pourrait à juste titre qualifier d’inscriptions « monumentales » supplémentaires, quatre grandes (ou autrefois grandes) inscriptions funéraires de la période du Premier Temple ont été découvertes à Jérusalem, dans la nécropole de Silwan, au bord de la vallée du Cédron.
La plus complète de ces inscriptions de linteau de tombe, provenant de la tombe no 35 (plus longue), est celle de la « tombe de l’intendant royal ». Cette inscription, actuellement conservée au Musée britannique, est généralement liée au récit de l’intendant Schebna dans Ésaïe 22. Bien que le nom de l’inscription ait été effacé, les titres des individus sont exactement les mêmes—תיבה לע רשא. Les deux textes contiennent des malédictions, ils datent de la même période, et le passage d’Ésaïe condamne Schebna qui « se creuse un sépulcre sur la hauteur, il se taille une demeure dans le roc ! » (verset 16).
Trois autres inscriptions fragmentaires ont été trouvées : Tombe no 35 (plus courte), no 34 et no 3. Au total, il y a huit registres de texte, avec 30 mots conservés (ou pouvant être restaurés) composés de 95 lettres.
Amulettes
Deux petites amulettes en argent, les rouleaux de Ketef Hinnom, constituent sans doute les découvertes épigraphiques les plus importantes jamais faites à Jérusalem. Découverts en 1979 par le Dr Gabriel Barkay dans une tombe du 7e siècle avant Jésus Christ à l’orée de la Vallée de Hinnom, ces deux rouleaux miniatures contiennent le plus ancien texte scriptural connu à ce jour. Ketef Hinnom i contient un texte identique, lettre pour lettre, à celui de Nombres 6 : 24-25 et Deutéronome 7 : 9 ; Ketef Hinnom ii contient le texte de Nombres 6 : 24-26. En tant que tels, ces textes funéraires sont souvent qualifiés de « bénédictions sacerdotales ».
Malgré leur taille minuscule (respectivement 27 par 97 millimètres et 11 par 39 millimètres), ces rouleaux d’argent contiennent un total remarquable de 30 registres de texte, dont 45 mots composés de 162 lettres.
Sceaux
Rien n’évoque autant l’administration que la prédominance des sceaux et de leurs empreintes.
Un total de 32 sceaux épigraphiques, contenant 49 noms discernables, ont été trouvés à Jérusalem jusqu’à présent. Essentiellement de forme ‘scarabéidé’, ces sceaux jérusalémites sont faits de divers matériaux, dont la cornaline, l’agate, l’ivoire, l’os, la stéatite, la phosphorite, le calcaire, le bronze, l’hématite et le lapis-lazuli. Ces sceaux ont été datés du 9e au début du 6e siècle avant Jésus Christ et contiennent un total de 60 registres de texte, dont 62 mots composés de 260 lettres.
L’importance des 32 sceaux est bien mise en évidence par l’article de Reich et Benjamin Sass de 2006, « Three Hebrew Seals from the Iron Age Tombs at Mamillah, Jerusalem » (Trois sceaux hébraïques provenant des tombes de l’âge du fer à Mamillah, Jérusalem). Ils écrivent : « Jérusalem, avec neuf sceaux, [...] est le site avec le plus grand nombre de sceaux trouvés lors des fouilles, qu’ils soient gravés en hébreu ou dans une autre langue. Ce phénomène coïncide avec le fait que, à l’âge du fer II, Jérusalem était la capitale de Juda, le siège de la cour royale et du temple de Yhwh, et le siège de toutes les institutions dont les besoins administratifs étaient suffisamment importants pour nécessiter l’utilisation de sceaux personnels gravés » (c’est nous qui soulignons).
Si neuf sceaux ont suffi à mettre en évidence l’importance de l’administration jérusalémite comme étant bien au-delà des sites régionaux, c’est plus que triplement le cas aujourd’hui.
Au total, 52 sceaux ont été découverts lors de fouilles sur des dizaines de sites judéens de la période du Premier Temple (y compris Jérusalem). La plupart de ces sceaux (46) sont répertoriés dans la publication des Professeurs Yosef Garfinkel et Anat Mendel-Geberovich de 2020 « Hierarchy, Geography and Epigraphy : Administration in the Kingdom of Judah » (Hiérarchie, géographie et épigraphie : administration dans le royaume de Juda), et six sceaux supplémentaires. Ainsi, les sceaux de Jérusalem représentent à eux seuls près des deux tiers de la totalité.
Bulle-enveloppes
Les inscriptions les plus connues de Jérusalem, tant par leur nombre que par leur référence à des personnages bibliques, sont peut-être les bulle-enveloppes, c’est-à-dire les empreintes de sceaux d’argile laissées par les sceaux des fonctionnaires. Les noms des personnages bibliques Ézéchias, Achaz, Jucal, Schélémia, Guedalia, Paschhur, Guemaria, Schaphan, Hilkija, Azaria, Nathan-Mélec et Ésaïe ont tous été trouvés sur des bulle-enveloppe de Jérusalem (ainsi qu’une douzaine d’autres noms de moindre certitude).
Les fouilles menées à Jérusalem ont permis de découvrir 162 bulle-enveloppes, soit 319 registres de texte contenant 377 mots composés de 1 275 lettres, et il ne s’agit là que des bulles épigraphiques (bulles portant du texte). Un nombre bien plus important de bulles essentiellement iconographiques (bulles portant des images) a été découvert.
Par exemple, bien que la Dre Eilat Mazar ait découvert 57 bulle-enveloppes épigraphiques lors de ses fouilles dans la Cité de David, son décompte total en était de 256. Les fouilles de Reich et Shukron dans la Cité de David ont permis de découvrir 14 bulle-enveloppes épigraphiques sur plus de 170. Les fouilles du Dr Joe Uziel dans la Cité de David ont produit un total de 13 bulle-enveloppes sur 68. La liste est encore longue. Si l’on incluait les bulles iconographiques, le nombre total dépasserait largement les 600. Ces bulle-enveloppes couvrent toute la période du Premier Temple de Jérusalem, du 10e au 6e siècle avant Jésus Christ.
En effet, toutes ces bulle-enveloppes, qu’elles soient épigraphiques ou iconographiques, témoignent d’un niveau élevé d’alphabétisation et de fonctions administratives. C’est ce que montre en particulier le verso de ces sceaux d’argile : une majorité d’entre eux portent des empreintes de papyrus, ce qui montre qu’ils scellaient un grand nombre de documents littéraires qui circulaient (nous y reviendrons).
À titre de comparaison, Lakis est souvent considérée comme la « deuxième ville » de Juda. Lakis est même reconnue pour avoir un nombre comparativement élevé de bulle-enveloppes, comme cela est discuté dans l’article de Garfinkel et Mendel-Geberovich. Pourtant, face aux centaines de bulle-enveloppes découvertes à Jérusalem, combien ont été découvertes à Lakis ? Seulement 23.
Un dernier point sur les bulle-enveloppes. Il existe une certaine classification connue sous le nom de « bulle-enveloppes fiscales » (la grande majorité de ce corpus est constituée de « bulle-enveloppes privées »). À l’heure actuelle, on connaît un total de 35 bulle-enveloppes fiscales, qui proviennent presque toutes, malheureusement, du marché des antiquités. Cependant, on pense généralement qu’elles proviennent logiquement de Jérusalem. Sur ces 35 bulle-enveloppes, trois (et peut-être une quatrième) sont de provenance connue : toutes proviennent de Jérusalem.
Sceaux d’anses de jarres
Tout comme les bulle-enveloppes, les anses de jarres portent souvent des empreintes de sceaux privés ou publics. Treize empreintes de sceaux privés d’anses de jarres sont connus grâce aux fouilles de Jérusalem, portant 24 noms de personnes (dont 22 sont uniques). Ces 13 empreintes de sceaux, datant du huitième au début du sixième siècle avant Jésus Christ, comportent un total combiné de 25 registres de texte, contenant 27 mots composés de 105 lettres.
Les empreintes d’anses de jarres avec le texte lmlk (ךלמל)—« Appartenant au roi »—sont toutefois beaucoup plus courantes. La fonction exacte de ces sceaux, apparus sous le règne d’Ézéchias, fait encore objet de débats. Une théorie répandue veut qu’il s’agisse d’une mesure administrative prise en prévision de l’invasion assyrienne de Sanchérib.
Outre le texte de lmlk, ces sceaux portent généralement le nom de l’une des quatre villes suivantes : Hébron, Ziph, Soco ou Mmst (תשממ, un mot hébreu encore discuté). Ils portent également un motif représentant soit un scarabée ailé de style égyptien (comparer avec 2 Rois 18 : 20-21 ; Ésaïe 30 : 1-3 ; 31 : 1-3) ou un soleil ailé (à comparer avec le motif sur la bulle du roi Ézéchias, Malachie 4 : 2 et la conviction de la Dre Mazar que le soleil ailé sur la bulle-enveloppe se rapporte mieux à la vie ultérieure d’Ézéchias, après sa guérison—The Ophel Excavations : Final Reports Vol. II, Pages 255-256 ; Les fouilles de l’Ophel : rapports finaux, vol. II).
Il est difficile d’obtenir un décompte précis de ces sceaux, car ils sont relativement courants et peu signalés. Le site Web spécialisé LMLK.com est parfois cité dans la presse, avec un total de 294 pour les fouilles à Jérusalem. Malheureusement, cette ressource n’a pas été mise à jour depuis un certain temps. Sur la base d’un examen des publications relatives aux fouilles ultérieures, on peut affirmer que nous disposons actuellement d’un minimum de 317 empreintes de sceaux lmlk provenant de Jérusalem, mais ce nombre est probablement beaucoup plus élevé. La plus grande partie de ces empreintes, 107 au total, provient des fouilles de Kathleen Kenyon dans la Cité de David.
Ostraca
Jérusalem n’est pas connue pour sa quantité d’ostraca—tessons de poterie encrés. La pratique consistant à utiliser des tessons de poterie brisés comme support d’écriture est surtout connue grâce aux dépôts de Samarie (102), d’Arad (plus de 200) et d’autres sites. Néanmoins, 21 ostraca ont été mis au jour à Jérusalem, contenant un total de 62 registres de texte, avec 102 mots composés de 355 lettres. On y trouve notamment des listes administratives de noms.
En fait, le manque comparatif d’ostraca trouvés à Jérusalem par rapport à d’autres sites judéens plus petits est intéressant d’un autre point de vue. Dans leur excellent article de 2020, Garfinkel et Mendel-Geberovich écrivent : « À première vue, cette situation est paradoxale : les sites marginaux contiennent-ils en réalité plus de preuves d’écriture que les principaux centres du royaume ? »
« De toute évidence, la plupart des bulle-enveloppes proviennent de Lakis et de Jérusalem », écrivent-ils. « Nous soutenons que la distribution des ostraca et celle des bulle-enveloppes se complètent et se compensent mutuellement. C’est dans les deux principaux centres du royaume, Jérusalem et Lakis, que les titulaires des plus hautes fonctions bureaucratiques étaient actifs. Ils écrivaient sur des papyrus coûteux et utilisaient leurs sceaux pour les sceller. En revanche, sur les sites mineurs et dans la périphérie du royaume, le papyrus était plus difficile à trouver et les petits fonctionnaires qui y travaillaient écrivaient donc sur des tessons de poterie, disponibles en abondance dans tout site antique. Ceci explique la prédominance des inscriptions à l’encre sur ostraca dans les sites mineurs et des bulle-enveloppes dans les grands centres. »
Ainsi, la prévalence des ostraca pourrait être interprétée comme un signe de pauvreté administrative (oui, je parle de Samarie—encore une fois, comparativement)—par opposition à une administration riche, utilisant des empreintes de sceaux et basée sur le papyrus.
Autres inscriptions sur la poterie
Une soixantaine d’inscriptions sur poteries précuites et postcuites, ciselées et gravées, ont été mises au jour à Jérusalem. Elles datent du 10e siècle au début du 6e siècle avant Jésus Christ. Elles contiennent un total de 61 registres de texte, dont 72 mots composés de 151 lettres.
Parmi elles, cinq inscriptions en caractères sud-arabique—quatre provenant de la Cité de David, datées provisoirement du neuvième siècle avant Jésus Christ, et une de l’Ophel, datée du dixième siècle avant Jésus Christ. La dernière, récemment identifiée et publiée par le Dr Daniel Vainstub comme un texte sud-arabique faisant référence à l’encens, a fait la une des journaux dans le monde, grâce à son lien implicite avec le récit biblique du commerce de l’encens entre le royaume sud-arabique de Saba et Jérusalem durant le 10e siècle avant Jésus Christ (voir ArmstrongInstitute.org/901).
Autres objets gravés
Parmi les autres inscriptions remarquables trouvées à Jérusalem figure un objet cylindrique en pierre de grande taille (38 centimètres sur 14) contenant un seul registre, une phrase de quatre mots et de 17 lettres. D’après les « révisions » ou « corrections » contenues dans l’inscription, ce morceau de pierre aurait été une sorte d’exercice de scribe. Daté du huitième siècle avant Jésus Christ, il a été découvert lors des fouilles de la Cité de David à Silo.
En outre, un poids en bronze de forme cubique (un pym) portant une inscription de trois registres, trois mots et 13 lettres a été découvert dans la terre superficielle du mont du Temple. Publié pour la première fois en 1903 par George Barton, le Dr Barkay date l’objet d’un point de vue paléographique assez tôt, entre le 10e et le 9e siècle avant Jésus Christ.
La liste des inscriptions pourrait encore être allongée. Ce corpus de travail n’inclut pas (encore) les grandes quantités de poids en pierre gravés, à caractères limités, trouvés à Jérusalem. Il n’inclut pas non plus les centaines de « marques de potiers » et autres inscriptions à caractère unique qui ont été découvertes (dont beaucoup contiennent une forme de symbole x, +, ת ou ט ; également des poignées de jarres portant un symbole פ ou ק, ce dernier étant suggéré comme signifiant « korban »). Yair Shoham a relevé 304 poignées incisées de ce type dans les seules fouilles de la Cité de David à Silo (Qedem, 41). Si l’on ajoute ces inscriptions supplémentaires, le nombre total d’inscriptions de la période du Premier Temple trouvées à Jérusalem s’élèverait certainement à plusieurs milliers.
Une vision encore trop étroite
Et encore, cela ne nous donne qu’une vision extrêmement limitée du niveau d’administration et d’alphabétisation de la capitale judéenne. Encore une fois, ce corpus est strictement limité géographiquement au centre névralgique de Jérusalem—au territoire de la colline occidentale/Ville haute et de la colline orientale/Ville basse, ou directement adjacent à celles-ci. À proximité immédiate, cependant, se trouvent plusieurs bâtiments administratifs importants de la période du Premier Temple, dont la fonction était directement liée à celle de Jérusalem et en découlait.
L’un de ces exemples est le complexe palatial du 8e siècle avant Jésus Christ récemment découvert à Armon HaNatziv, qui surplombe la Cité de David depuis le sud. Un autre complexe administratif proche et daté de la même façon se trouve à Arnona, où les fouilles ont récemment fourni un trésor de 124 sceaux lmlk et 17 sceaux d’anses de jarres privés, ces derniers ayant été présentés comme « l’un des plus grands [corpus] exposés lors de fouilles dans la région de Juda. » Un peu plus au sud-ouest, mais toujours à proximité, se trouve Ramat-Rachel, un autre site connu pour sa quantité importante de sceaux lmlk (environ 200) et sur lequel deux sceaux gravés ont été découverts.
La Jérusalem de la période du Premier Temple, en tant que capitale administrative, n’était pas une petite ville isolée et périphérique, et ne devrait donc pas être examinée uniquement en tant que telle. Certes, la comparaison de vestiges épigraphiques aussi riches et variés provenant des environs de la ville centrale montre à elle seule que Jérusalem était une puissance administrative incomparable. Cependant, à l’extérieur des murs de la ville se trouvait également une structure administrative satellite nécessaire pour gérer les affaires de l’État, et ces structures, ainsi que leurs inscriptions, devraient être considérées conjointement pour évaluer l’importance et la force de la capitale.
Répondre à certaines objections
Naturellement, des objections à cette analyse de la puissance administrative de Jérusalem seront (et ont été) formulées. L’une d’entre elles est que Jérusalem a fait l’objet de fouilles importantes, d’où le grand nombre d’inscriptions mises au jour. Cela est vrai. Depuis un siècle et demi, de nombreuses fouilles ont eu lieu dans la ville. Mais il en va de même dans d’autres endroits d’Israël, souvent à grande échelle.
Jérusalem, cependant, est un endroit beaucoup plus difficile à fouiller. Elle est, dans la plupart des zones, densément peuplée. Même dans les quelques zones qui ne le sont pas, la politique et d’autres facteurs rendent les fouilles incroyablement difficiles. En outre, la plupart des fouilles effectuées à Jérusalem se sont concentrées sur des vestiges datant d’une période beaucoup plus tardive (islamique, byzantine et romaine). Et il est hors de question de fouiller le mont du Temple, au cœur de la Jérusalem antique. La plupart des fouilles dans la ville ont été menées au coup par coup, dans des zones très sélectionnées et restreintes. En revanche, Tel Megiddo, par exemple, est un énorme site entièrement ouvert aux fouilles. Il en va de même pour de nombreux autres sites, tels que Tel Dan et Tel Hazor—ainsi que le site de l’ancienne Samarie.
Mais pour les besoins de l’argumentation, prenez n’importe quelle fouille à Jérusalem, en vous limitant aux vestiges de l’âge du fer. Les fouilles de Reich et Shukron dans la Cité de David ont trouvé 170 bulle-enveloppes ; les fouilles d’Uziel dans la Cité de David en ont trouvé 68 ; les fouilles de Mazar dans la Cité de David en ont trouvé 256 ; les fouilles de Kenyon dans la Cité de David ont trouvé 107 sceaux lmlk ; et les fouilles récentes d’Arnona, 141 sceaux d’anse de jarre. La liste est encore longue.
Mis à part les sites entiers, existe-t-il des fouilles uniques qui se comparent de manière aussi cohérente ?
Une autre objection, concernant les quantités de bulle-enveloppes trouvées à Jérusalem, est que le tamisage humide—pratique qui n’est en vogue que depuis une vingtaine d’années—a contribué à produire l’abondance d’inscriptions administratives. Cela aussi est vrai. Mais la pratique du tamisage humide ne se limite pas à Jérusalem. Et aucune des quatre inscriptions monumentales de Jérusalem n’a été tamisée. Aucune des quatre grandes inscriptions funéraires n’a été tamisée. Il en va de même pour le trésor de 51 bulle-enveloppes, l’un des plus grands ensembles de bulle-enveloppes de Jérusalem, découvert lors des fouilles de Silo.
La Jérusalem de David et de Salomon ?
Il est vrai que la plupart des inscriptions référencées—mais pas toutes—datent du 8e au début du 6e siècle avant Jésus Christ. Dans le contexte du débat sur l’importance et la puissance administrative de la Jérusalem de l’âge du fer iia (10e siècle avant Jésus Christ)—la période de David et Salomon, cela pourrait être considéré comme une validation des théories d’une faiblesse relative de la ville, au moins pendant cette période. Faut-il en conclure que l’écriture, l’activité des scribes et une administration significative n’ont émergé à Jérusalem qu’à partir du huitième siècle avant Jésus Christ ?
Bien au contraire.
Ce corpus s’est penché uniquement sur les découvertes épigraphiques. Nous disposons encore de plusieurs objets de ce type datant des 10e et 9e siècles avant Jésus Christ—ce qui reste considérable par rapport aux découvertes faites sur d’autres sites (ce que souligne le professeur Christopher Rollston dans son article de 2017 intitulé « Epigraphic Evidence From Jerusalem and Its Environs at the Dawn of Biblical History : Methodologies and a Long Durée Perspective » (Preuves épigraphiques de Jérusalem et ses environs à l’aube de l’histoire biblique : méthodologies et une perspective de longue durée).
La plupart des vestiges épigraphiques de Jérusalem se présentent sous la forme de sceaux et d’empreintes de sceaux. Il est désormais évident que ces méthodes d’administration—l’utilisation de sceaux épigraphiques, de sceaux contenant partiellement ou principalement du texte—n’ont réellement vu le jour qu’au cours du 8e siècle avant Jésus Christ. Mais cela ne signifie pas que la pratique du scellement de documents ait été inexistante, ni même réduite, au cours des siècles précédents.
Ce corpus a traité avec les inscriptions. Mais même là, nous n’avons qu’une vision limitée de l’administration, car il n’inclut pas seulement du matériel iconographique. Avant le 8e siècle avant Jésus Christ, les documents administratifs circulaient encore à l’intérieur de Jérusalem (et dans une large mesure), mais pendant la période de l’âge du fer iia, ils étaient marqués par des sceaux iconographiques.
Le Corpus der Stempelsiegel-Amulette aus Palästina/Israel (2017, pages 282-511) d’Othmar Keel le démontre avec pertinence. Son corpus contient 65 de ces sceaux glyptiques qui ont été trouvés à Jérusalem, datés entre le milieu du 11e et le 8e siècle avant Jésus Christ—la majorité d’entre eux étant attribuée au 10e ou au 9e siècle. Parmi ces sceaux glyptiques, certains contiennent des hiéroglyphes et une poignée des « pseudo-écritures ». La majorité d’entre eux, cependant, sont purement iconographiques. En fait, pour cette période antérieure de la Jérusalem du Premier Temple, nous disposons d’une quantité nettement plus importante de sceaux iconographiques que de sceaux épigraphiques de cette dernière.
Il en va de même pour les empreintes de sceaux—les bulle-enveloppes. Keel documente 176 bulle-enveloppes de cette période équivalente qui ont été découvertes à Jérusalem. De même, la majorité d’entre elles datent des 10e et 9e siècles avant Jésus Christ. Dans ce cas également, nous avons plus de bulle-enveloppes iconographiques de la première moitié de l’histoire de Jérusalem que de bulle-enveloppes épigraphiques de la seconde moitié de l’histoire.
À l’époque de David et de Salomon, des estampilles sont en circulation et des objets sont estampillés avec une énergie sans doute non moins grande que pendant les années plus tardives du développement et de l’administration jérusalémites.
À cette fin, les impressions au verso de ces premières bulle-enveloppes sont encore plus importantes. Il est regrettable que pour une grande partie du corpus de Keel, les impressions au verso ne soient pas identifiables (en raison des dommages) ou qu’elles ne soient pas mentionnées. Cependant, pour celles qui le sont, la majorité de ces bulle-enveloppes du 10e au 9e siècle contiennent des impressions de papyrus (47 au total). Cela montre qu’une quantité importante de documents écrits circulait au sein d’une administration jérusalémite nécessairement alphabétisée, au cours de la toute première période de la capitale.
C’est certainement de la seconde moitié de la période du Premier Temple de Jérusalem que provient la plus grande quantité de sceaux et de bulle-enveloppes strictement textuels. Mais cela n’implique en aucun cas un manque d’alphabétisation ou de compétences administratives pendant la période antérieure. Nous disposons toujours d’une grande quantité de sceaux, de bulle-enveloppes et, surtout, d’impressions de documents sur papyrus.
Ce qui est évident, c’est qu’au cours du huitième siècle avant Jésus Christ, il y a simplement eu un changement dans les méthodes administratives de la Judée—passant de sceaux essentiellement iconographiques à des sceaux épigraphiques. Il reste à savoir s’il s’agissait d’une décision religieuse, politique ou autre. Mais il ne s’agissait certainement pas d’une décision prise en raison de l’alphabétisation ou la capacité administrative.
On pourrait comparer cela à notre époque moderne. Beaucoup, sinon la plupart, de nos sceaux, chevalières, etc. sont basés sur des motifs—blasons familiaux, symboles, dessins—et non sur le type de texte insipide que l’on trouve sur de nombreuses bulle-enveloppes trouvées plus tard durant l’âge du fer iib. Cela nous rend-il moins lettrés ?
En résumé
Où se trouvent de telles quantités d’inscriptions provenant d’autres sites ? Samarie ? Megiddo ? Hazor ? Cet article ne prétend pas qu’il n’y en a pas eu, ou même qu’il y en a eu une quantité insignifiante. Mais si la rareté des découvertes est considérée comme une « preuve » de l’insignifiance—comme c’est souvent le cas pour Jérusalem (en particulier aux 10e et 9e siècles), ne devons-nous pas en conclure que les villes israélites du nord étaient au moins comparativement plus pauvres sur le plan administratif ? Que Jérusalem se démarque des autres comme un colosse administratif ?
Si l’on se base uniquement sur la quantité de vestiges d’inscriptions provenant de l’âge du fer ii, aucune ville, dans tout le Levant, ne peut être comparée à Jérusalem. Aucune autre ville de Judée. Aucune ville du nord d’Israël. Aucune ville phénicienne, philistine, moabite, édomite ou ammonite, capitale ou non. D’autres sites de ce type peuvent être connus pour leur quantité de supports épigraphiques individuels, tels que les ostraca (par exemple, Samarie—bien que, comme nous l’avons vu, ce support puisse être décrit, au mieux, comme une marque de pauvreté administrative). Cependant, Jérusalem est un site à part, inégalé en termes de quantité et de variété de vestiges épigraphiques, et avec des exemples de toutes les époques—10e, 9e, 8e, 7e et début du 6e siècle avant Jésus Christ.
D’après les vestiges épigraphiques connus, la Jérusalem de la période du Premier Temple est, parmi les villes de l’ancien Levant, une puissance administrative inégalée.
Encadré : les papyrus de Jérusalem
Hormis les régions désertiques du Néguev, le climat d’Israël n’est pas propice à la préservation des matériaux organiques anciens tels que les papyrus. Nous ne pouvons donc nous faire une idée de la circulation de ces documents qu’à partir de leurs vestiges « fantômes » au dos des bulle-enveloppes qui les scellaient—les impressions sur papyrus.
On ne connaît que trois fragments de papyrus de la période du Premier Temple, tous provenant de la région de la mer Morte. Mais l’un de ces fragments mentionne, en effet, le nom de « Jérusalem » et fait état d’une livraison de vin à la ville (d’où son nom de « papyrus de Jérusalem »).
Il va sans dire que ces documents de la capitale—les papyrus—auraient contenu, et de loin, le plus grand pourcentage de matériel textuel, de la plus grande importance textuelle.
Encadré : Les femmes de Jérusalem
Il existe une hypothèse moderne assez répandue selon laquelle la « période biblique » était marquée par une sorte de système patriarcal étouffant, opprimant les femmes et les faisant quasiment disparaître de la société. Ce n’est absolument pas le cas, comme l’illustrent à la fois l’archéologie et la Bible (cette dernière étant défendue par Carol Meyers dans son article de 2014 du Journal of Biblical Literature intitulé « Was Ancient Israel a Patriarchal Society ? » (L’ancien Israël était-il une société patriarcale ?). En tout cas, ce n’était certainement pas le cas dans la capitale, Jérusalem.
Sur les 32 sceaux découverts à Jérusalem, au moins quatre détenteurs sont des femmes. En outre, si l’on compare le nombre de sceaux qui appartiennent clairement à des femmes avec ceux qui appartiennent clairement à des hommes (à l’exception des noms trop abîmés pour être identifiés), on obtient un rapport de 4 : 20, soit exactement 20 pour cent, entre les femmes et les hommes détenteurs de sceaux. (Dans un article de 2006, le Dr Gabriel Barkay présente cinq autres sceaux jérusalémites, qui ne sont pas inclus dans ce corpus car ils ne correspondent pas suffisamment aux paramètres de la provenance connue. Toutefois, s’ils s’avéraient légitimes, ils porteraient le total à 37 pour Jérusalem—et le fait que l’un d’entre eux appartienne également à une femme correspond parfaitement au ratio 4 : 20).
Considérez également : Lakis est souvent citée comme la « deuxième ville » de Juda, pourtant, nous avons autant de sceaux de Jérusalem portés par des femmes que de sceaux de Lakis dans leur intégralité. En fait, les sceaux dont l’appartenance à des femmes est prouvée ne sont connus qu’à Jérusalem.
Il convient également de noter que l’un des sceaux privés d’anses de jarre mentionnés dans l’article appartenait à une femme, et que deux ostraca font référence à des femmes, l’un d’entre eux étant un registre de blé ou d’orge à fournir à une liste de destinataires féminins. Il s’agit là encore de la seule liste de femmes connue dans un contexte archéologique de l’âge du fer ii, ce qui a conduit Garfinkel et Mendel-Geberovich à conclure : « Apparemment, seules les femmes jérusalémites occupaient des positions sociales et économiques élevées » (« Hierarchy, Geography and Epigraphy : Administration in the Kingdom of Judah »).
De telles découvertes ne sont peut-être pas surprenantes : la présence de femmes occupant certains postes de haut rang à Jérusalem est soulignée dans la Bible, comme les prophétesses Hulda et l’épouse d’Ésaïe (2 Rois 22 : 14 ; Ésaïe 8 : 3).