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Angela Merkel donne sa première interview post-chancellerie

L’ancienne chancelière allemande Angela Merkel [FABIAN SOMMER/PICTURE ALLIANCE VIA GETTY IMAGES]

Angela Merkel donne sa première interview post-chancellerie

Qu’est-ce que l’ancienne « dirigeante non officielle de l’Europe » a à dire sur le monde ?

L’ancienne chancelière allemande Angela Merkel a accordé une interview à Die Zeit. Publiée le 7 décembre, il s’agit de sa première interview depuis qu’elle a quitté ses fonctions en 2021. Merkel, qui a été chancelière de 2005 à 2021, avait été décrite comme « la femme la plus puissante du monde » et « la dirigeante non officielle de l’Europe ». Maintenant qu’elle a quitté ses fonctions depuis un an, quel est son point de vue sur la situation en Allemagne et dans le monde ? Voici quelques extraits de l’interview :

Merkel se méfie-t-elle des Allemands ?

Je ne parlerais pas de méfiance à l’égard de mon propre peuple, mais d’une méfiance générale à l’égard des humains, car les gens sont capables de choses incompréhensibles. L’Allemagne a poussé cela à l’extrême, de manière terrible, sous le national-socialisme. C’est pourquoi je suis tellement convaincue que la structure de notre État et la Loi fondamentale contiennent un haut degré de sagesse dans lequel l'indépendance de la presse, du pouvoir judiciaire, des processus démocratiques sont bien pensés.

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Pourquoi Merkel a-t-elle approuvé le gazoduc Nord Stream 2 ?

Ce n’est pas le gouvernement allemand qui a demandé l’approbation de Nord Stream 2, ce sont les entreprises. Pour le gouvernement fédéral et pour moi, il s’agissait donc de décider si nous devions faire une nouvelle loi comme un acte politique afin de refuser expressément d’approuver Nord Stream 2. [Le refus d’approbation] aurait considérablement détérioré notre compétitivité. Aujourd’hui, sous la pression de la guerre, c’est ce que je soutiens, mais à l’époque, cela aurait été une décision politique beaucoup plus massive [que je n’aurais pas prise], d’autant plus qu’il n’y aurait pas eu d’acceptation du tout.

Que pense Merkel des relations germano-russes ?

Je vais vous dire un point qui me préoccupe. Il s’agit du fait que la guerre froide n’a jamais vraiment pris fin, car la Russie n’a pas été pacifiée. [L’Allemagne] aurait dû réagir plus rapidement à l’agressivité de la Russie. L’Allemagne n’a pas atteint l’objectif de 2 pour cent malgré l’augmentation. Et je n’ai pas tenu un discours enflammé à ce sujet tous les jours.

La société allemande pourrait-elle s’effondrer ?

Elle doit être vécue par chaque individu, sinon elle peut rapidement s’effondrer. […] Bien sûr, il ne s’agit pas de toute l’Allemagne, mais nous ne devons jamais déclarer qu’une partie des individus d’un pays sont des marginaux et le reste, pour ainsi dire, des représentants de la vraie démocratie. Cela ne débouche sur rien de bon.

L’interview de Merkel est révélatrice pour plusieurs raisons. Premièrement, elle a essuyé beaucoup de critiques pour sa relation avec le Président russe Vladimir Poutine pendant son mandat. Ces critiques se sont amplifiées avec le début de la guerre en Ukraine, quelques mois après son départ à la retraite. Ses commentaires semblent admettre que son approche à l’égard de la Russie a été un échec. Avec son héritage de la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne a été réticente à se militariser. Mais déclarer que « la guerre froide n’a jamais vraiment pris fin » et que « la Russie n’a pas été pacifiée » implique que l’Allemagne aurait dû adopter une approche plus conflictuelle. Une Allemagne dotée d’une armée suffisamment puissante pour contrer la Russie serait sans précédent dans les temps modernes.

Deuxièmement, le gazoduc Nord Stream 2 a été construit pour transporter le gaz naturel de la Russie vers l’Allemagne. Le gazoduc passe sous la mer et contourne l’Europe de l’Est. La plupart des autres gazoducs russes passent par des pays comme l’Ukraine et la Pologne. Les analystes pensaient que Nord Stream 2 permettrait à la Russie d’envahir l’Europe de l’Est sans porter atteinte à ses marchés d’exportation de gaz. La guerre en Ukraine semble confirmer ces prédictions. Merkel a minimisé le coût élevé de ses décisions, mais elle a également pointé du doigt les entreprises allemandes comme étant la force motrice du gazoduc. En 2021, il a été rapporté que l’industrie allemande lui a « tordu le bras » pour que le gazoduc soit approuvé.

Troisièmement, l’aveu tacite de Merkel que la société allemande « pourrait rapidement s’effondrer » est de mauvais augure. Lors des élections nationales de 2015, le parti d’extrême droite Alternative für Deutschland est devenu le principal parti d’opposition. L’État de Thuringe, quant à lui, a élu Die Linke, le successeur du Parti communiste d’Allemagne de l’Est, pour son gouvernement d’État. Récemment, les autorités allemandes ont arrêté 25 personnes soupçonnées d’avoir fomenté un coup d’État. Selon Merkel, l’extrémisme reste une menace pour l’Allemagne.

Angela Merkel a reconnu que l’Allemagne se dirige vers des temps troublants. Elle a notamment cité la période nazie comme un signe avant-coureur historique. Beaucoup voient aujourd’hui l’Allemagne comme un bastion de la liberté et de la démocratie, mais si les commentaires de l’ancienne chancelière signifient quelque chose, l’Allemagne est en route pour plus de « choses incompréhensibles ». Pour en savoir plus, lisez la brochure du rédacteur en chef de la Trompette, Gerald Flurry, Un dirigeant allemand fort est imminent.